Pourquoi Sarkozy a perdu

Publié le par le desobeissant

Il a perdu pour la bonne et simple raison que, malgré toutes les apparences, il n’était pas porteur d’un programme.

 

 

 

sarkozy demission-2-baeb0[1]Bien sur, il a répondu aux attentes de 53% des Français, en promettant aux uns et aux autres ce qu’ils avaient envie d’entendre.

Mais en mettant bout à bout des idées contradictoires, on ne fait pas pour autant un programme.

Il a promis aux plus nantis d’entre nous le fameux « bouclier fiscal  », sur lequel il est obligé bon gré, mal gré de revenir aujourd’hui, car en privant son pays de ces milliards, il s’est en quelque sorte « tiré une balle dans le pied ».

Et la crise, que des économistes, tel Paul Jorion, avaient bel et bien prévu dès 2004, l’a rattrapé au tournant. lien

Il a longuement disserté sur « l’erreur des 35 heures » sans les supprimer pour autant, faisant ainsi plaisir aux patrons, et aux cadres. lien

Il a perdu, car il a voulu faire croire qu’il allait moraliser un « capitalisme sans foi, ni loi », et ce n’est pas en changeant la couleur des paradis fiscaux, en les passant du noir au gris, que l’on en change la réalité.

Une fois de plus, on est resté dans l’effet d’annonce, le beau discours attendu, comme celui de Toulon du 25 septembre 2008.

Les paradis fiscaux sont toujours là, et bien la, l’affaire Bettencourt en témoigne, et comme on l’a vu, Patrick de Maistre, gestionnaire de la fortune des Bettencourt, a transféré l’argent de Suisse, menacé par le fisc, vers d’autres paradis fiscaux…à Singapour par exemple.

Sur ce lien, l’enregistrement ou l’on entend Patrick de Maistre dire « on est en train de mettre le compte à Singapour  » (et l’enlève de Suisse, ou çà devenait trop dangereux).

Quand aux parachutes dorés, ils sont toujours opérationnels. lien

Il a évoqué l’insécurité, ce fantasme dont les retraités, et les nantis sont convaincus, et qui n’est pourtant pas une réalité.

C’est Laurent Mucchielli, un sociologue qui le dit : « le nombre d’homicides en France s’élève à 819, soit moitié moins qu’en 1989 (…) 80% des actes sur les personnes se font dans le cercle des connaissances, 30% dans le cercle marital, 20% dans la famille proche, et les 30% restants parmi les connaissances (…) les viols sont majoritairement un phénomène familial »

Et les chiffres sont têtus. lien

Sarközi a perdu parce, étant en réalité privé de programme réel, il s’est entouré de conseillers ayant des avis divergents. De Guaino à Guéant, en passant par Soubie et Levitte, c’est la guerre ouverte, et suivant des témoignages, ils en sont parfois presque venus aux mains. lien

Des lors, prenant chez l’un une idée, et chez l’autre une autre idée, il s’est mis en constante contradiction, ce que l’on perçoit très bien aujourd’hui, devant l’effarant manque de pragmatisme.

Il a perdu car en stigmatisant l’étranger, il s’est attiré les bienveillances des xénophobes, des extrémistes de droite, lesquels doutant que leur mentor, Le Pen en l’occurrence, pourrait emporter la partie, avaient préféré jouer la carte du « réalisme politique » en votant pour celui qui avait des chances de l’emporter.

Ce qu’ils ne referont pas en 2012. lien

De plus la récente volonté de stigmatiser et les banlieues, et les Roms a provoqué l’effet contraire, la division dans son propre camp, et la réprobation des citoyens, des églises et des états. lien

Il a perdu car en stigmatisant ce qu’il a appelé « la racaille  », et en privant la banlieue d’un plan social, il l’a laissé se marginaliser, et en supprimant la police de proximité, il a crée une situation d’affrontements et de « guerre civile ».

Il a perdu parce que, en montrant du doigt « l’assisté » et en agitant le leurre du « travailler plus pour gagner plus », il a séduit une partie de la population qui avait « envie de croire à ce concept », mais on a vu qu’il ne fonctionnait pas.

Il a perdu car, en dépensant des fortunes en communication, on peut entretenir quelques mois une illusion, mais, il a oublié qu’aujourd’hui un outil rapide et cruel, Internet, fait vite sauter le « rideau de fumée » des illusions et des mensonges.

Les petites phrases volées par des caméras indiscrètes, ou des téléphones portables, se sont retrouvées sur le net, et on a découvert la vraie nature d’un Président vulgaire et méprisant.

En effet, on est encore dans le domaine de la communication et de l’illusion si on croit un instant qu’en invitant un opportuniste de gauche, comme Bernard Kouchner, dans son gouvernement, il s’agit d’une « ouverture à gauche ».

En dévoyant Eric Besson, considéré par le siens comme un traitre, on ne justifie pas pour autant d’une ouverture.

En reprenant les mots de Jaurès, et en les manipulant, sans en appliquer les valeurs, on ne fait pas pour autant une politique sociale. lien

Tout cela n’était que de la communication, et rien de plus.

Mais le plus grave, c’est qu’il a perdu dès le premier jour, en fêtant sa victoire avec les nantis de son bord, ses amis friqués, il a privé ses électeurs de leur victoire, parce qu’il n’a pas voulu la partager avec eux.

Bien sur, il a tenté de corriger le tir, en masquant sa nature « Bling-Bling », mais le mal était fait.

La Cour des comptes, même si elle n’a qu’un avis de principe, a vite montré du doigt ses dépenses pharaoniques, dont le peuple a petit à petit découvert les détails.

Il a enfin perdu car son gouvernement est composé de personnalités dont la crédibilité s’est étiolée au fil des temps.

Le premier ministre, privé de tout pouvoir, est passé pour un homme transparent, incapable de donner une impulsion à son pays, mais comment remplacer un homme plus populaire que lui-même ?

Eric Woerth, l’homme qui voulait se faire passer pour chevalier blanc, est maintenant démasqué, et les français horrifiés, découvre la triste réalité d’un homme qui est suspecté d’être « un conflit d’intérêt ambulant » et dont la démission est réclamée. lien

Le coup de grâce, c’est donc l’affaire Bettencourt, car Sarközi sait que Woerth est le dernier fusible, et que, s’il saute, ce qui est prévisible, il va, lui, se trouver en première ligne.

Il s’agit bel et bien d’une affaire d’état, dans laquelle Sarközi est impliqué, pour être suspecté d’avoir échangé services rendus à la première fortune féminine de France, contre financement de sa campagne de 2007. lien

Entre la suspicion de légion d’honneur (lien) offerte à Patrice de Maistre, en échange de valises bourrées de billets en provenance de Suisse, et celle de l’abus de situation de faiblesse d’une vieille dame qui n’avait plus manifestement toute sa tête, il a donné au pouvoir une image terrible, dont les français ne veulent pas.

Aujourd’hui, il est prisonnier de ses contradictions, et il est obligé de reporter en novembre le remaniement ministériel prévu en octobre.

Les raisons sont multiples.

Il espérait une embellie, il espérait avoir réussi à étouffer l’affaire Bettencourt, il espérait une reprise économique, il espérait que le monde sortirait de la crise, et ces espoirs sont déçus.

Sur France Culture, (l’économie en question) le 4 septembre, les économistes invités évoquaient unanimement une crise qui durera une décennie...au moins.

Et pourtant, paradoxalement, Sarközi peut encore gagner en 2012.

Soit en démissionnant avant la fin de son mandat, espérant provoquer un clash, un désordre à gauche, celle-ci n’étant pas encore prête à reprendre la main, et redevenant « l’homme providentiel, le dernier recours ».

Soit en espérant être malgré tout présent au second tour, en 2012, en appliquant les mêmes recettes qu’en 2007, car les Français sont d’incorrigibles rêveurs, et sont toujours prêts à écouter les bonimenteurs.

Olivier Cabanel

 

Source :Agoravox

Publié dans Politique

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